LE SIDA SOUS-EVALUE DANS LE CAUCASE NORD
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LE SIDA SOUS-EVALUE DANS LE CAUCASE NORD
En Tchétchénie, les dernières statistiques parues en décembre 2005 font état de 560 cas de personnes infectées par le VIH, dont 57 couples mariés et 14 mineurs. Le nombre de femmes infectées s’élève à 97 et 15 personnes sont mortes du sida.
Mais les médecins du Centre pour la prévention et la lutte contre le sida de Tchétchénie font observer que ces données ne concernent que 17 % de la population. Ces chiffres ne sont donc que la partie visible de l’iceberg et les estimations plus réalistes du centre donnent des chiffres compris entre 1600 et 2000 personnes infectées.
En fait, personne ne sait vraiment. Selon les chiffres de l’ONU, en Europe, la Russie serait le pays comptant le plus grand nombre de personnes infectées, environ 850 000. Les prévisions les plus pessimistes estiment qu’il y aurait 1,4 million de personnes infectées soit à peu près 1% de la population.
Dans le Caucase nord, une combinaison de facteurs locaux accentuent le problème. En Tchétchénie, la plupart des problèmes sont d’ordre technique. Le centre de dépistage manque d’équipement et son laboratoire a fonctionné selon un horaire limité du mois d’août au mois de novembre 2005.Une fois que des dons de tests ont été faits par des agences caritatives en novembre, les choses se sont améliorées.
L’usage des drogues est l’une des raisons principales de la propagation de l’infection. « 53 % des malades ont été infectés par des injections intraveineuses », déclare Khedi Aidamirova, médecin chef du centre de prévention. « Les autres ont été infectées lors de relations sexuelles. En plus, il y a des cas où la transmission s’est faite de la mère à l’enfant, durant la grossesse ou pendant l’allaitement au sein ».
Zakir, un habitant de Grozny âgé de 36 ans se drogue depuis 20 ans. Ses tentatives pour se désintoxiquer ont pris fin avec le second conflit tchétchène en 1999. Sa femme est partie cet automne-là avec leur fils et leur fille dans un camp de réfugiés en Ingouchie, et il est resté au pays, retournant dans leur maison à moitié détruite à Chermorechye, dans la banlieue de Grozny. Il a commencé à se piquer, en trouvant l’argent nécessaire pour sa drogue en pillant les maisons vides, en démontant des cuisinières, en découpant du linoléum, en enlevant des carrelages pour les vendre.
Il a été pris par la police et il a été envoyé au camp d’Udmurtia, dans le centre de la Russie. Là, il a a subi un test qui a confirmé sa séropositivité. Après avoir purgé sa peine, il est retourné à Grozny, et il a dit à sa femme que le médecin avait inventé ce diagnostic. Sa femme l’a cru, mais il a fait un second test qui a confirmé le premier. Il fait partie des 17 malades qui reçoivent un traitement au centre de Grozny.
Leich Khekhaev, responsable du département d’épidémiologie de l’institution est très inquiet de la stigmatisation qui entoure la maladie.
« Nous savons que nos 17 malades sont infectés par le VIH, mais nous ne savons pas grand-chose de leur histoire. Nous n’avons pas le droit de prendre des mesures préventives dans leurs familles. Ce qui est effrayant, c’est que ces gens sont porteurs du virus sans le savoir. Parce qu’ils ont peur d’être découverts, ils sont prêts à sacrifier la vie de leurs femmes et de leurs enfants ».
Les professionnels de la santé affirment que les préjugés amènent les gens à croire que le sida est un problème en Afrique ou en Occident, peut-être ailleurs en Russie, mais certainement pas dans leur région. Des médecins du centre de dépistage disent qu’ils ont été menacés par des membres des forces de sécurité locale quand ils leur ont dit qu’ils étaient séropositifs. Certains ont refusé de croire le résultat des test et ont été en faire un autre ailleurs ; d’autres rejettent simplement tout contact avec les médecins, de peur des commérages.
Les préjugés sont très forts. Le centre de lutte contre le sida partage un bâtiment avec la maternité de l’hôpital principal de Grozny. Malina Abdurazakova qui est venue voir sa nièce exprime à voix haute ce que tout le monde pense . « J’ai entendu dire qu’il y avait cette maladie ici, mais cela ne veut rien dire pour moi. Je vois beaucoup de gens venir au laboratoire du centre pour faire des tests. Ce sont des jeunes, surtout. J’ai pensé à ma fille qui pourrait se marier avec quelqu’un qui l’air bien comme ça, mais qui est séropositif ».
Le pays voisin, le Daghestan, qui n’a pas l’excuse d’un conflit dévastateur, souffre aussi de ce même problème de l’infection par le VIH qui ne dit pas son nom. Ces neufs derniers mois, 123 nouveaux cas ont été diagnostiqués. La ville de Derbant est la plus touchée. « Au mois de janvier 2005, nous avions 21 cas déclarés, au début de cette année, nous en avons 83 », constate Abdul Abdullayev, du Centre de prévention et de lutte contre le sida du Daghestan.
Comme en Tchétchénie, le partage des seringues est un problème majeur et 52 des 83 personnes infectées sont des toxicomanes. « On pense que c’est honteux de parler du sida ici, quand on parle du sida, c’est comme si on parlait de sexe, on ne discute pas de ça dans notre société », avoue Samira, une commerçante de Derbent.
Zagid Kurbanov, un pharmacien qui exerce depuis plus d’une dizaine d’années, remarque : « il y a dix ans que nous savons qu’il y a des cas de sida ici, mais les gens sont toujours embarrassés quand il s’agit d’acheter des préservatifs ».
Derbent a son propre centre de dépistage où les tests peuvent être pratiqués, mais la chef de laboratoire, Svetlana Gamzatovan, est formelle : « Il y peu de gens qui viennent faire des tests. C’est juste quand ils demandent un emploi. C’est la mentalité locale. On a beau leur dire que c’est absolument confidentiel, ici, c’est une petite ville et les gens ont très peur qu’on les voit sortir d’un centre de dépistage du sida ».
La psychologue Irina Rudakova, responsable du Genesis Women’s Crisis Centre, confirme que le sida et le VIH sont les tabou les plus importants au Daghestan. « Depuis cinq ans que le centre fonctionne, nous avons donné des conseils aux femmes sur divers cas, y compris des cas d’inceste, mais nous n’avons pas eu le moindre cas d’une personne infectée par le VIH. C’est le plus tabou de tous les sujets ».
L’ignorance sur la question du VIH-sida est largement répandue dans le Caucase nord, où la plupart des gens ne savent pas qu’un diagnostic de séropositivité n’est pas une condamnation à mort. Les préjugés sont les plus forts.
« Je ne voudrais pas avoir pour ami un séropositif, et si jamais, Dieu me vienne en aide, je devais tomber malade, je ne le dirais à personne ; même pas à ma famille ; tout le monde me tournerait le dos ». Telle est la conviction profonde de Yarakhmed, un étudiant de Derbent.
jimmyolsen- Admin
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Le problème
Le problème avec le Sida, c'est qu'il fait référence à certains comportements qui sont condamnés dans certainess cultures. Ici, en l'occurence, nous parlons de l'Islam. Finalement, de Dakar à Islamabad, d'Alger à Ryad, le Sida est une maladie qui est largement occultée. Lorsqu'on lit les statistiques publiées par les organismes gouvernementaux, on n'en revient tout simplement pas. Le Sida est presque inconnu dans certains pays. Bien entendu, les décès qui lui sont liés sont classés dans d'autres catégories.
franco45- Invité
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