Abkhazie et l’Ossétie du Sud : un coup de poignard dans le dos pour la Serbie ?
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Abkhazie et l’Ossétie du Sud : un coup de poignard dans le dos pour la Serbie ?
Alors que la Russie répète qu’elle n’a pas l’intention de reconnaître l’indépendance du Kosovo, certains analystes serbes et russes pensent que la reconnaissance russe des provinces séparatistes géorgiennes affaiblit la position de la Serbie dans sa défense du Kosovo.
Cependant, l’ambassadeur de Russie aux Nations Unies, Vitalij Churkin, a déclaré mardi soir, évoquant les événements du Caucase, que la Russie n’avait pas l’intention de reconnaître l’indépendance du Kosovo.
« Les dirigeants serbes ont constamment prévenu que la proclamation unilatérale du Kosovo et la reconnaissance de cet acte illégal pouvait être un précédent dangereux qui allait déstabiliser les autres régions du monde », a indiqué le ministère serbe des Affaires étrangères. « On peut malheureusement constater que ces prévisions se sont réalisées ».
Belgrade rappelle également son engagement en faveur du droit international et du maintien de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des États internationalement reconnus, et en premier lieu de la République de Serbie.
Sisojev : « la Serbie reste seule »
Si la Serbie suivait la position de Moscou, elle irait à l’encontre de ses propres arguments sur l’intégrité territoriale, en reconnaissant la proclamation unilatérale de l’indépendance de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie.
Cependant, si la Serbie ne se prononce pas, Moscou pourrait le lui reprocher, alors que la Russie est son principal allié dans sa lutte pour le Kosovo. Spécialiste des questions internationales auprès du journal moscovite Komersant, Guennadi Sisojev estime que Moscou a réalisé ce qu’elle évoquait comme une possibilité après la proclamation unilatérale de l’indépendance du Kosovo et sa reconnaissance par les pays occidentaux . « Ce que l’Occident a fait pour le Kosovo, la Russie l’a fait pour l’Abkhazie et l’Ossétie », constate Guennadi Sisojev, tout en soulignant que Belgrade ne pourra plus s’appuyer sur Moscou. La Serbie reste donc seule dans sa lutte pour le Kosovo.
« Le fait que la Russie elle-même se soit servi du précédent kosovar a considérablement affaibli la crédibilité de ses positions en faveur de la défense du Kosovo et, indirectement, la position de la Serbie elle-même », reconnaît-il. « Maintenant la Russie n’a plus le droit moral de s’appuyer sur le droit international, car on lui rétorquera qu’elle a utilisé le précédent du Kosovo en Ossétie du sud et en Abkhazie ».
Pendant toute la crise géorgienne, le gouvernement serbe a fait preuve d’une grande discrétion. Dans son unique déclaration, le Premier ministre Mirko Cvetković, après un entretien avec l’ambassadeur russe à Belgrade, a appelé toutes les parties à cesser le conflit et à régler la crise du Caucase par la voie diplomatique.
Lazić : « La Serbie ne doit pas reconnaître la sécession des provinces géorgiennes »
Dušan Lazić, un expert du Forum pour les relations internationales de Belgrade, considère que Belgrade ne doit en aucun cas reconnaître l’Ossétie du sud et l’Abkhazie. Dans cette hypothèse, la Serbie montrerait qu’elle ne mène pas la même politique qu’avec le Kosovo
« La Serbie va demander à l’Assemblée générale des Nations Unies de se prononcer pour saisir la Cour internationale de justice afin que celle-ci tranche sur la question du Kosovo. Je pense que Belgrade doit rester fidèle à cette ligne, et ne pas prendre de mesures hâtives en suivant la Russie, alors que celle-ci vient d’adopter une position contraire à celle de la Serbie en ce qui concerne le Kosovo », dit Lazic.
Malgré cela, Dušan Lazić n’exclut pas la possibilité que Moscou demande aux autorités belgradoises de reconnaître l’indépendance des régions géorgiennes. Si la Russie l’exigeait, Dušan Lazić estime que le gouvernement serbe devrait faire valoir ses arguments, en expliquant qu’il n’est pas dans son intérêt de soutenir la violation de l’intégrité territoriale de la Géorgie. « On ne peut pas dans un cas défendre l’intégrité territoriale d’un pays, et dans un autre cas s’engager en faveur de la proclamation d’Etats indépendants », note-t-il.
« L’abandon de ces positions de principe est le meilleur exemple de la politique à géométrie variable que pratiquent aujourd’hui tous les pays puissants de la planète », estime Dušan Lazić. Malgré tout, il ne s’attend pas à un changement de la position actuelle de Moscou envers le Kosovo : « la position russe envers le Kosovo ne va pas à l’encontre de celle de Belgrade ».
« La position russe envers le Kosovo était fondée sur les intérêts de la Russie et elle était avant tout un message destiné aux principaux partenaires occidentaux de Moscou, aux puissances avec lesquelles la Russie rivalise au niveau international. Par conséquent, avant même que la Russie choisisse de ne pas reconnaître le Kosovo, elle avait élaboré une stratégie servant au mieux ses intérêts. Ces intérêts n’ont pas changé et je ne vois pas pourquoi Moscou changerait sa position », conclut Dušan Lazic.
Boško Jakšić : « les Russes ont bien étudié l’exemple du Kosovo »
L’éditorialiste du quotidien Politika, Boško Jakšić, ne s’attend pas à ce que la Serbie reconnaisse l’indépendance de l’Ossétie du sud et de l’Abkhazie, car la reconnaissance de ces territoires géorgiens signifierait la reconnaissance du Kosovo. Boško Jakšić estime aussi que la Russie a bien étudié le cas du Kosovo : pendant la crise du Caucase, la rhétorique utilisée par Moscou était la même que celle des responsables occidentaux pendant le conflit au Kosovo.
La décision de reconnaître l’Ossétie du sud et l’Abkhazie prouve que la Russie n’a pas peur d’une détérioration de ses relations avec l’OTAN, constate Boško Jakšić.
thierry.F- Nombre de messages : 138
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