Le "Cyborg Beetle"... Le début de la fin ?
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Le "Cyborg Beetle"... Le début de la fin ?
Un article écrit dans Le Monde.
Imaginez la scène. Allongé dans l’herbe par un bel après-midi d’été, vous savourez le spectacle d’un scarabée crapahutant paisiblement à portée de votre main. Sauf qu’à y regarder mieux, la bucolique créature présente quelques bizarreries. Au niveau des ailes, du dos, du cerveau, de petits fils électriques s’infiltrent sous sa carapace. Un objet métallique, deux fois gros comme sa tête, semble collé à l’arrière de celle-ci. L’insecte, vous le comprenez soudain, est un « cyborg » (diminutif de cyber organisme), fusion d’un être vivant et d’un équipement technologique. Un espion vivant, téléguidé par des implants reliés à son système nerveux.
Mauvais rêve ? Pas du tout. Le « Cyborg Beetle » existe bel et bien. Les chercheurs qui l’ont conçu à l’université du Michigan l’ont officiellement présenté durant la dernière conférence MEMS (Micro Electro Mechanical Systems), qui se tenait en janvier à Tucson (Arizona). Le coléoptère Dynastes tityus avait été doté :
de trois électrodes, deux plongeant dans les muscles des ailes, la troisième dans le ganglion cérébral, à proximité des neurones contrôlant le vol ; d’un contrôleur électronique alimenté par une pile lithium-ion ; d’un stimulateur visuel composé de diodes électroluminescentes, placées grâce à un bras coudé devant les yeux de l’insecte afin de l’inciter à tourner vers la gauche ou vers la droite.
L’ensemble, pilotable à distance comme un modèle réduit, ne présente à l’heure actuelle qu’un défaut : sa taille – ou plutôt celle de sa technologie embarquée. Car le vrai cyborgespion, en bonne logique, est celui qui ne se distingue pas d’un être normal. Et qui saura voler à cent mètres au-dessus de celui qui le contrôlera, et atterrir à moins de 5 mètres de sa cible… l’objectif, là encore, est loin d’être atteint : l’infortuné coléoptère, à ce jour, ne sait que voler en rond et en zigzag.
Il n’empêche : Cyborg Beetle existe. Et avec lui tout un bestiaire d’insectes robotisés, qui préfigurent les nouveaux espions que prépare dans ses laboratoires la recherche militaire. Car le scarabée n’est qu’un parmi les nombreux projets actuellement développés par l’Agence américaine pour les projets de recherche avancée de défense (Darpa), dans le cadre de son programme HI-MEMS (HI pour « Hybrid Insect »).
Le but ultime : miniaturiser et internaliser dans un insecte volant la technologie nécessaire au parfait espion. Et fusionner ces « organes » électroniques avec ceux de l’animal en les insérant dès le stade de la chrysalide, de manière à ce que tissus biologiques et artificiels créent entre eux des connexions solides et stables. Une hybridation que l’on commence à maîtriser : à l’Institut Boyce Thompson d’Ithaca (Etat deNewYork), des sondes en plastique souple destinées à commander le vol ont été implantées dans des chrysalides de sphinx du tabac, une semaine avant la métamorphose des papillons. Lesquels sont nés avec leurs électrodes connectées sur le dos et les muscles des ailes, en parfait état de fonctionnement.
Une armée d’insectes transportera-t-elle un jour, à notre insu, caméras,poisons ou charges explosives ? Au-delà de cette perspective peu réjouissante, l’hybridation entre matières vivante et technologique pourrait bien, demain, concerner notre propre espèce. A dire vrai, la transformation a déjà commencé. Pour ne prendre qu’un exemple : deux Américains gravement accidentés, Jesse Sullivan et Claudia Mitchell, sont équipés (depuis 2005 pour le premier, 2006 pour la seconde) de bras bioniques. Développée au Rehabilitation Institute de Chicago (RIC), leur prothèse est capable de capter les impulsions électromusculaires qui traduisent leur intention de mouvement, puis de transcrire ces contractions en commandes mécaniques. Donc, de transformer la pensée en gestes. Un bon exemple de ce que l’interface « cerveau-machine » sera capable de réaliser demain.
A quelle fin ? Selon la pensée « transhumaniste », très influente dans le monde anglo-saxon, les progrès de la technoscience doivent permettre l’amélioration de notre espèce même. Truffé de prothèses électroniques ou chimiques, branché en permanence sur des réseaux de contrôle sanitaire ou sécuritaire, l’homme futur, dans lequel des senseurs se substitueraient à nos sens et l’ordinateur à notre pensée autonome, marquerait ainsi une nouvelle étape de l’évolution : l’avènement du « Techno sapiens ».
Un progrès par rapport à l’Homo sapiens ? Peut-être. Mais comment garantir que ce cyborg que nous deviendrons restera totalement maître des éléments qui composeront son corps « augmenté » ? Qui décidera du degré d’« amélioration » accordé à chacun ? Celle-ci sera-t-elle imposée dès l’enfance, voire dès la naissance ? Verra-t-on apparaître une société à deux vitesses, certains ayant les moyens de devenir cyborgs et d’autres non ?
« Au-delà du débat éthique que suscitent ces perspectives, une autre question non résolue concerne la plasticité du corps biologique, souligne Bernard Andrieu, professeur d’épistémologie du corps et des pratiques corporelles à l’université Henri-Poincaré de Nancy. Jusqu’à quel stade l’implantation d’éléments extérieurs dans un être vivant relève-t-elle de l’hybridation, à partir de quel stade devient-elle aliénation ? Autrement dit : quel est le degré d’adaptation du programme biologique au programme technologique ? »S’il situe dans unavenir lointain l’amélioration de nos capacités cérébrales les plus élaborées (calcul, pensée), cet expert considère comme acquise à court terme l’augmentation de nos capacités sensorielles.
« En 2020, avoir une caméra surpuissante à la place de l’oeil est tout à fait imaginable. De même pour l’ouïe et peut-être pour l’odorat », estime-t-il. D’abord élaborées pour ceux qui présentent un handicap sensoriel, ces prothèses internes surpassant la nature pourraient ensuite être convoitées par tout un chacun. La normalité d’aujourd’hui deviendra alors le handicap,de demain, et l’oeil humain le plus performant une machine obsolète… Mais qui, pour ce corps technologiquement suréquipé, se chargera du service après-vente ?
Catherine Vincent
Bitteulze- Nombre de messages : 12
Age : 44
Date d'inscription : 29/05/2008
on n'arrête plus le progrès
cet article me rappelle des vieux films d'espionnage où la miniaturisation était utilisée. Sinistre un peu, mais la miniaturisation pourrait un jour permettre d'entrer dans le corps pour réparer des organes sans les inconvéniants du choc post-traumatique. Comme quoi, il y a du bon et du mauvais en tout. Inquiètant, oui, mais aussi facinant.
GEGElge- Invité
miniaturisation
comme toujours, dans la science, il y a bien des choses bonnes et des choses mauvaises. Après tout, le GPS était une création de l'armée américaine et il nous sert chaque jour pour nous diriger. Il ne faut pas toujours paniquer face aux inovations techniques et technologiques.
maryline678- Nombre de messages : 6
Age : 36
Date d'inscription : 09/06/2008
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