Les petits barrages seraient plus préoccupants que les grands
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Les petits barrages seraient plus préoccupants que les grands
La France est, après l'Espagne, le deuxième constructeur européen de barrages. Son parc actuel est évalué à 744 ouvrages de plus de 10 mètres de haut, dont 296 de plus de 20 mètres, et des milliers d'ouvrages de taille inférieure ! Le parc de barrages est constitué en majorité d'ouvrages anciens. Entre 1955 et 1985, 250 barrages hydrauliques auraient été édifiés en France, soit une moyenne de 8 barrages par an. Depuis 1985, ce rythme a ralenti. 4 ouvrages ont été bâtis en moyenne par an sur cette période.
Pendant longtemps, l'énergie hydraulique a été la seconde source de production d'électricité en France. Si depuis 1973, la production d'énergie d'origine hydraulique n'a que modérément augmenté, sa part de production totale d'électricité est passée de 26 % en 1973 à 10 % en 2005. Mais les installations hydrauliques ont bien d'autres fins que la production d'électricité. Alimentation en eau potable, irrigation des terres agricoles, alimentation des canaux de navigation, régularisation des débits des cours d'eau, prévention des crues…
Le nombre d'ouvrages hydrauliques de petite et moyenne taille s'est démultiplié en France. Le député Christian Kert, auteur d'un rapport sur l'amélioration des barrages et ouvrages hydrauliques adopté par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques le 2 juillet dernier, a ainsi dénombré 2870 barrages dans le Gers, 1370 dans le Tarn…
L'objectif de mon travail était au départ d'étudier les grands barrages hydrauliques français, précise l'élu. Mais en cours de recherche, je me suis rendu compte qu'il y avait davantage de problématiques sur les petits barrages. Il y en a des milliers à travers la France, auxquels il faut ajouter des digues contres les crues…Alors que les grands barrages sont pour la plupart bien gérés, les petits ouvrages posent davantage de problèmes.
Les barrages ont une incidence sur le paysage, l'environnement humain et les écosystèmes qu'ils investissent. La plupart de ces ouvrages ont été conçus dans les années 60- 70 sans réelle planification et sont, pour certains, passés aux oubliettes depuis…
Aujourd'hui, il n'existe pas de photographie d'ensemble des barrages et ouvrages hydrauliques en France. D'ici la fin de l'année 2008, un recensement complet du nombre et de l'état actuel de ces ouvrages devrait permettre de combler ce manque et de mieux appréhender les éventuelles problématiques causées par ces installations. 20 % des petits et moyens barrages poseraient problème aujourd'hui, précise la rapporteur Christian Kert.
La question de la responsabilité
Un barrage est un ouvrage qui vit, travaille et se fatigue en fonction des efforts auxquels il est soumis. Les grands ouvrages sont soumis à une inspection régulière. Un examen extérieur doit être effectué chaque année et tous les dix ans, la retenue d'eau doit être vidée afin de permettre l'accès à la partie inférieure du barrage et aux différents équipements (vannes, grilles…). Le rapport est rassurant dans le fait que nous n'avons pas constaté d'état de délabrement sur les grands barrages, note le député. C'est au niveau des petits barrages que la problématique se pose.
Car si les grands ouvrages sont régulièrement inspectés, les petits et moyens ouvrages le sont beaucoup moins. Les plus petits (classe D*) ne font l'objet d'aucun contrôle. Les exploitants de l'ouvrage ont la responsabilité civile et pénale d'assurer la sûreté de fonctionnement des barrages. Or, comme l'a démontré l'enquête qu'a menée sur le terrain le député Kert, beaucoup de maîtres d'ouvrages, privés ou publics, ignorent leurs devoirs ou n'ont pas les moyens financiers de les respecter. La question des solutions financières se pose. Pour les petites communes qui n'ont pas les moyens d'entreprendre des travaux, le Conseil général devrait être responsabilisé. Dans le cas de propriétaires privés, la question est plus délicate…
Les grands barrages hydroélectriques et la libéralisation du marché
Le suivi des grands barrages hydroélectriques, même s'ils sont peu préoccupants selon le rapport, doit être renforcé pour prévenir les accidents. Christian Kert préconise un suivi du plan d'EDF « SuperHydro ». L'entreprise a annoncé, après les révélations en mars 2007 du magazine Capital sur l'état des barrages gérés par EDF*, un important programme d'investissements pour la maintenance et la réhabilitation : Il faut veiller à ce qu'il y ait bien dans l'intégration du budget d'EDF une enveloppe suffisante pour faire une maintenance appropriée et de qualité, et donc maintenir l'entretien à un point d'équilibre.
Avec l'ouverture du marché de l'électricité, la question des concessions se pose également. Pour répondre à cette problématique, le décret n°2007-1735 reprend en les accentuant les dispositions mises en place pour ausculter les barrages et analyser leur comportement.
Un autre texte à paraître prochainement devrait modifier les décrets antérieurs relatifs à la concession. Son objet principal est de définir les modalités du processus de mise en concurrence des concessions hydroélectriques. Ce texte doit impérativement considérer que la sécurité des ouvrages et de leur exploitation constitue un élément essentiel des dossiers de renouvellement. Nous devons être certains de la qualité des éventuels repreneurs des sites EDF, préconise le rapport.
Des dégâts écologiques
Le rapport du député Kert, centré sur les risques, notamment humains, liés aux barrages et ouvrages hydrauliques, n'aborde pas la question de la protection de l'environnement, question régulièrement soulevée par les associations. Si depuis 1977, les maîtres d'ouvrages doivent fournir une étude d'impact et si les ouvrages doivent respecter une réglementation qui leur impose certaines mesures de préservation du milieu naturel, beaucoup d'installations anciennes perturbent aujourd'hui la continuité biologique et le fonctionnement hydro géomorphologique des rivières.
* Les barrages sont classés en 4 catégories, de A à D : A pour les barrages de plus de 20m de haut, B pour les barrages de plus de 10m et dont le rapport BMI (calcul prenant en compte la hauteur et le volume de la retenue) est supérieur à 200, C pour les barrages de plus de 5m et dont le rapport BMI est supérieur à 20, D pour les autres barrages de hauteur supérieure à 2m.
* En mars 2007, le magazine Capital révèle que, d'après un rapport confidentiel d'EDF, 200 des 450 barrages gérés par l'entreprise sont jugés vétustes et présenteraient des risques de rupture ou d'effondrement). C'est à la suite de ces révélations qu'a été missionné le député Kert pour faire un rapport sur la sécurité des barrages et ouvrages hydrauliques.
emarcel- Nombre de messages : 38
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