UNE AUTRE ENTREPRISE EST-ELLE POSSIBLE ?
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UNE AUTRE ENTREPRISE EST-ELLE POSSIBLE ?
Le capitalisme repose sur l’accaparement et la transmission des richesses en son sein et sur la main mise des pouvoirs qu’il couvre du nom de démocratie. La lutte de classes existe. Elle a lieu entre ceux qui vendent leur force de travail, parfois à « eux-mêmes » et ceux qui l’utilisent suivant leurs intérêts. Les oppositions entre producteur et non producteur, travail utile et travail inutile, travail intellectuel et travail manuel sont des distinctions sociologiques. Elles ont une grande importance pour affiner les propositions et leurs applications. Elles doivent être utilisées pour dépasser l’émiettement des fonctions qu’impose le capitalisme. Elles ne peuvent être utilisées pour opposer les travailleurs entre-eux. L’entreprise a besoin des compétences de chacun et chacune pour créer une économie, une société respectueuse des hommes et de la nature. L’entreprise est le cœur du système capitaliste. Son capital est détenu par les actionnaires. Une voix correspond à un pourcentage de l’entreprise. Les actionnaires sont les maîtres de l’entreprise quoi qu’elle fabrique et qu’elle que soit la qualité de ses salariés. Pourtant aucune entreprise n’a besoin de compétence « actionariale » pour créer, fonctionner, produire et vendre. C’est le lieu de l’aliénation mais aussi une communauté de travail où l’objectif commun des travailleurs qui la composent n’est pas le profit mais la qualité de leur production. L’entreprise ne doit pas être diabolisée. Le travail est un référent social. Ce qu’il faut combattre c’est ce que le capitalisme en fait. La privatisation des moyens de production est une réalité qui handicape l’essor des forces productives. L’état d’avancée et les perspectives ouvertes par les sciences et les techniques permettent d’envisager des luttes concrètes pour le dépassement du capitalisme. Les forces productives ont des intérêts communs pour que le mode de production actuel s’oriente vers la satisfaction de leurs besoins. La division actuelle du travail, malgré les contradictions que le capitalisme lui impose, tend à la recherche de coopération, d’entraide. Un processus de collectivisation des savoirs est nécessaire lors du process de travail. Les nationalisations, résultat de rapport de forces et conquêtes ouvrières n’ont pas amené les changements souhaités. Elles ont toujours conservé les ferments de la gestion capitaliste. Les pays dits « socialistes » en s’érigeant en Etat-Parti unique ont permis des déviances comme le culte de la personnalité et la croyance que toute pratique devait se plier à la théorie. En figeant leur analyse au temps du marxisme de Marx ils n’ont pas maîtrisé les contradictions et ont laissé émerger une classe étatique et non le peuple dont en définitive ils se méfiaient. Ils ont aussi entraîné un mépris écologique singeant les pays capitalistes dans une course au rattrapage économique. Les nationalisations de par leur caractère étatique et le rôle que joue l’Etat ne correspondent plus à la réalité des aspirations. 1 .-Le projet doit donc contenir un engagement de créer une entreprise d’un type nouveau au sein même du régime capitaliste, déconnectant le capital des actionnaires, court-circuitant la Bourse et dont les modalités de fonctionnement seront affinées contradictoirement. La timidité à aborder concrètement son sens fondamental n’ a jamais permis de proposer autre chose qu’une approche frileuse et singeant l’entreprise capitaliste. Peut-on continuer à penser, même si on s’en défend, que tout porteur d’un projet d’entreprise n’a pour but que de faire fortune et d’exploiter les travailleurs à cette fin ? Nombre de cadres n’adhérent plus aux finalités de l’entreprise capitaliste et sont mal à l’aise vis-à-vis du rôle qu’on leur impose. Les salariés sont écoeurés, en colère, de lutter toujours, sans espoir de changement, contre les atteintes à leurs droits et être bafoués dans leurs capacités. Toute entreprise en création a besoin d’un fonds de roulement, de trésorerie, pour démarrer son activité. Ce qui démontre l’étau financier du « crédit » que les Pme doivent consentir à leurs donneurs d’ordres qui leur imposent leurs conditions de règlements. Que ce financement soit apporté par d’autres entreprises, des personnes ou un organisme de crédit, l’entreprise dès sa constitution est démembrée en parts ou en actions. Ce financement s’appelle le capital social ! Celui-ci est scindé suivant les apports réels ou théoriques (des délais sont accordés pour le « libérer » dans certains types de sociétés comme la société anonyme) de ceux qui la constituent. Certains n’auront même pas un rôle actif dans son activité. Ce capital social est donc rarement à la hauteur des besoins de démarrage de l’entreprise. Pourtant il fige la propriété de l’entreprise. L’idée qu’une entreprise peut être créée avec un euro, en un jour. Qu’il suffit de vouloir et d’avoir une idée ne correspond pas à la réalité. Cela est encouragé en régime capitaliste pour inciter les chômeurs à créer leur entreprise, à disparaître des statistiques et à se payer soi-même. Il peut sembler normal qu’un actionnaire soit rémunéré du « risque » qu’il prend en prêtant à l’entreprise une part de ses biens. Pourtant ce « risque », l’entreprise lui doit toujours. Il peut à tout moment le faire disparaître en vendant ses actions. L’importance de ce risque, de cette trésorerie qui ne couvre que les besoins financiers nécessaire au démarrage de l’entreprise, n’a pas de relation avec les besoins de trésorerie renouvelés chaque mois. C’est l’entreprise et donc ceux qui y travaillent qui vont les constituer et pérenniser leur entreprise tout en remboursant les crédits accordés en son nom. La différence entre le chiffre d’affaires et les charges, le « bénéfice », c’est donc bien l’entreprise qui le crée. L’épilogue du tour de passe-passe consiste à ce que les dividendes (une part des bénéfices produits par le travail des salariés), soient pourtant récupérés par les seuls possesseurs du titre d’actionnaires. Leur part de dividendes n’est pas calculée sur l’importance du risque (la somme investie), mais « confondue » avec le bénéfice qui peut être distribué chaque année. Un seul exemple, la société Vinci dont 1 action du capital social équivaut à 5 euros. Le bénéfice distribué à cette action en 2006 se monte à 2,65 euros ! Pourtant en cas de liquidation, l’actionnaire ne « perdra » que son risque. On ne lui demandera pas de couvrir les dettes de l’entreprise ! Si le parti communiste français veut libérer l’initiative individuelle et collective dans un sens nouveau non aliéné à l’argent, il doit mettre en avant une entreprise où un homme(ou une femme) a une voix, où le capital est inaliénable car n’appartenant pas aux travailleurs qui la composent mais à l’entreprise. Les salariés prennent en assemblées générales toutes les décisions qui engagent leur avenir, votent ou non les bilans, réélisent ou révoquent les membres du conseil de contrôle, etc. Ils élisent en leur sein un conseil de contrôle et ont un droit de veto sur la désignation du ou des responsables de la gestion courante de l’entreprise. Les syndicats pourront mettre enfin en pratique toutes leurs prérogatives. Les banques et institutions de crédits prêteront le fonds de roulement nécessaire à la création ou au développement de l’entreprise à un taux bonifié. Ce taux sera différent suivant l’impact en emplois, en investissements productifs, en recherche et développement. Une garantie publique pourra être initiée. Les collectivités locales pourront être partie prenante pour des projets vivifiant le potentiel économique de leur territoire. Ce prêt sera remboursé suivant un échéancier négocié prenant en compte le plan d’entreprise établi et la réalité économique du secteur d’activité. L’entreprise se constituera en parallèle ses fonds propres (les bénéfices annuels accumulés). Dans ces fonds propres le capital social, inaliénable (non utilisable dans l’activité ni distribué) devra correspondre à une fraction conséquente de ses engagements. Propriété de l’entreprise il sera placé. Si l’entreprise, du fait de difficultés devait l’utiliser, il serait le garant de ses engagements. Ces capitaux sociaux placés alimenteront, à leur tour, les fonds de roulement nécessaires à la création d’autres activités. La vente, ou l’achat, la fusion d’une entreprise sera vue comme une fusion entre deux entreprises qui additionneront leur capital, leurs moyens de production et leurs compétences humaines en une seule, sans qu’il y ait circulation d’argent. Ce sont la majorité des salariés des deux entreprises qui décideront ou non de cette association. La création et l’activité d’entreprises sous leurs anciennes formes resteront tout à fait possibless. N’importe quelle entreprise restée sous son ancienne forme pourra bénéficier du nouveau dispositif lors d’opérations nouvelles utiles à son développement. Les entreprises en difficulté pourront opter pour ce nouveau cadre, ainsi que toute entreprise qui le souhaiterait. 2 .- Les entreprises dites publiques et qui le sont si peu devaient être possession de la collectivité de la même manière et au service de la collectivité. « L’Etat et la Sncf ont la responsabilité d’équilibrer le territoire et d’assurer un développement économique et social harmonieux, (Daniel Paul). » Et bien non, si on veut aujourd’hui enclencher un dépassement du capitalisme, l’exemple de la Sncf nous impose de poser ces questions : Pourquoi la Sncf devrait avoir un budget autonome ? C’est une « entreprise » d’intérêt collectif général dont le rôle est de répondre à la demande d’aménagement des territoires et de rendre un service optimum aux usagers, voyageurs comme entreprises. Son budget ne devrait-il pas être celui des territoires ? Un contrat d’objectifs et de moyens signé entre le collectif des salariés et les territoire entérinerait le service demandé. Un conseil de contrôle composé de représentants d’usagers, d’entreprises et d’élus suivrait l’application du contrat. Les moyens affectés par l’Etat seront bien sûr apportés. Cet exemple montre la nécessité de partir des besoins réels pour chiffrer l’engagement financier nécessaire et non des moyens qui sont fixés suivant des critères de rentabilité immédiate et handicapent le développement futur. L’Etat est budgétivore, général. Les territoires eux connaissent leurs besoins, sont en capacité de les mutualiser et de coordonner leurs moyens. Les actionnaires privés qui détiennent des actions d’un certain nombre d’entreprises publiques seront remboursés au prix du marché. 3 .- La fonction publique d’Etat, hospitalière ou territoriale, etc., avec les aménagements nécessaires à leurs spécificités et le même champ de déterminations rejoindra cette nouvelle forme d’entreprise citoyenne. La justice est dite au nom du peuple français par des citoyens. Les entreprises publiques ou d’Etat garantes de l’intérêt général peuvent bien être gérées par ces mêmes citoyens ! La distinction artificielle entre l’intérêt général que défendraient les entreprises publiques ou d’Etat et l’intérêt individuel, égoïste des entreprises privées, sera ainsi progressivement remise en cause.
Farid- Invité
Lutte des classes ou lutte des "dieux"?
Il me semble que dans ce texte intéressant, Farid présente le combat (ou le débat ?) entre le dieu Argent (la finance) et le dieu Travail (l’entreprise ou l’économie), et montre que tout s’arrangerait si le dieu Argent se soumettait au dieu Travail.
Il faut se souvenir de l’adage bien connu : « Time is money ». Le temps c’est de l’argent. Mais le temps cela peut être le temps passé au travail (point de vue de l’entreprise) ou bien le temps à venir du remboursement (point de vue de la finance). Il y a un double sens au mot « temps ». Si on réunit les deux sens du temps, on a : le salaire = l’intérêt. Et sur base de cette égalité, on peut dire , comme Marx, que c’est le travail qui génère le profit (l’intérêt).
Mais en fait, il y a comme une structure en miroir entre le passé économique et le futur financier, dans laquelle ce futur financier (le remboursement avec intérêt) domine, tire à lui et surmène le passé économique (le travail) qui constamment peine à rattraper ce futur financier. L’économique passé est l’obligé du financier futur. Le travail est l'obligé de l'intérêt.
Mais ne faudrait-il pas remettre en question certains dogmes de l’économie-finance ?
I. C’est le travail qui fait la plus-value ou le profit. Oui, mais non. En fait ce qui apporte un bénéfice c’est le travail qui ne coûte rien, à savoir l’inventivité intellectuelle dont toute l’humanité peut profiter à grande échelle. Mais pas le travail manuel. Le travail manuel brut, c.-à-d. sans une invention intellectuelle qui l’organise et le met en forme, et le rend plus productif, eh bien ce travail manuel, pure force physique, n’apporte pas plus de profit que les matières premières ou les machines : il est comme elles un coût, rien d’autre. Mais l’inventivité intellectuelle n’est jamais rétribuée à sa juste valeur, étant donné qu’on ne peut ni la quantifier, ni la qualifier : combien de temps et d’efforts de recherche pour une invention, pour une trouvaille ? Et quelle est la valeur exacte de cette invention ou découverte ? C’est cette gratuité(*) quasi obligée de cette inventivité qui est le véritable facteur de désappauvrissement de l’humanité. Trop souvent il y a dévalorisation de l’effort et de l’inventivité intellectuels et corrélativement une surévaluation du travail manuel. Il faudrait remettre le travail en général et le travail manuel en particulier à la place qui est la sienne, à savoir un coût et pas une plus-value.
II. Peut-on d’une manière générale quantifier et même qualifier le travail ? Combien de travailleurs feraient mieux de rester au chômage plutôt que d’être contre-productifs à leur travail ? Et en plus ces travailleurs, qui au lieu d’apporter un plus ne font que du sabotage, sont plus payés que des chômeurs. Prenons le cas d’un professeur de mathématiques qui dégoûte les élèves des mathématiques. N’aurait-il pas mieux valu que ce professeur reste au chômage ? Bref il n’y a aucune mesure objective du travail d’un travailleur, ni en quantité ni en qualité, et donc jamais on ne peut dire qu’un salaire est mérité ou pas. C’est la raison pour laquelle, pour qu’il n’y ait pas d’injustice, tout le monde devrait être payé avec le même salaire. Sinon des travailleurs qui soi-disant travaillent mais en fait ne font rien, sont mieux payés que des travailleurs qui font beaucoup, et sont même mieux payés que des chômeurs. Est-ce normal ?
III. Les entreprises ont d’office des objectifs tournés vers le bien de toute la société. Mais non. Tous les travailleurs , tous les producteurs d’une entreprise travaillent d’abord et avant tout pour eux-mêmes, et pas pour les consommateurs ou les clients. C’est l’adage bien connu : « Si le client est roi, le commerçant est empereur ». Si vraiment les firmes étaient tournées vers le client (au lieu d’être tournées vers elles-mêmes), les gens trouveraient à acheter ce dont ils ont vraiment besoin et qui leur convient. Par exemple il n’y aurait pas toutes ces stupides voitures axées uniquement sur la puissance et la vitesse ou le design, mais bien plutôt axées sur la sécurité, l’économie, la fiabilité, la durabilité, etc. Quoiqu’on en dise, dans cette société de soi-disant abondance, souvent on trouve difficilement ce dont on a vraiment besoin, souvent on est bien obligé de se rabattre sur ce que les firmes (tous travailleurs confondus) condescendent à fabriquer et vendre(**).
IV. On considère généralement l’indexation des salaires (sur base d’un index à la consommation) comme allant de soi. Une indexation en pourcentage consiste à maintenir toujours le même rapport (p. ex. de 1 à 1,5 ; ou de 1 à 4 ; etc.) entre différents salaires quelle que soit l’augmentation. Le problème est qu’un petit salaire dépense tout à de la consommation, tandis qu’un gros salaire n’en dépense qu’une partie, le reste peut être épargné ou investi. Question concernant le gros salaire : pourquoi aligner (augmenter) sur de la consommation de l’argent qui n’est pas destiné à de la consommation mais à de l’épargne ou de l’investissement ? Et on voit bien que cette indexation profite surtout aux gros salaires, les petits salaires ne faisant que diminuer en fait, l’écart entre les salaires augmentant. Puisqu’il s’agit d’un index à la consommation, il faudrait donner à tout le monde la même somme, basée sur l’indexation du salaire le moins élévé, puisque la société, à moins d’être hypocrite et vicieuse, estime que ce salaire le moins élévé est suffisant pour vivre normalement, pour consommer normalement, c’est-à-dire est suffisant pour la consommation.
Que retenir de tout ceci ? La réflexion est toujours provisoire, en chemin, mais on voit que le combat (ou débat ?) entre les dieux(***) Travail et Argent n’est pas près d’être résolu.
++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++
(*) Une preuve que la gratuité du progrès intellectuel est vue comme allant de soi, c’est qu’on ne paye pas les élèves et les étudiants. Sans doute que les travailleurs manuels estiment que le cerveau est une machine qui fonctionne toute seule et que le développement intellectuel n’ a rien à voir avec l’effort et la fatigue ? Mais attention, on n’oppose pas ici le travailleur intellectuel au travailleur manuel ; on oppose le travail à l’inventivité – un manuel peut aussi être inventif.
(**) Mais ce phénomène n’est pas propre aux entreprises, il s’agit d’un phénomène humain généralisé. Ainsi on peut dire que l’enseignement est fait pour les enseignants et pas pour les enseignés (sinon ceux-ci ne s’embêteraient pas autant à l’école) ; que l’hôpital est fait pour les soignants et pas pour les soignés (sinon le séjour à l’hôpital serait plus correct) ; que le Ministère est fait pour les fonctionnaires et pas pour le public (sinon ces fonctionnaires seraient travailleurs, compétents et compréhensifs, ce que souvent ils ne sont pas) ; et ainsi de suite.
(***) C’est le débat (ou le combat ?) entre l’Economie et la Finance, ou entre le Travail et l’Argent, ou entre « le réel » (soi-disant) et « le virtuel » (soi-disant). Mais à partir du moment où ce qui est « réel » se virtualise et où ce qui est « virtuel » se réalise, il faudrait peut-être penser à élargir ce cadre pour le débat en question.
Il faut se souvenir de l’adage bien connu : « Time is money ». Le temps c’est de l’argent. Mais le temps cela peut être le temps passé au travail (point de vue de l’entreprise) ou bien le temps à venir du remboursement (point de vue de la finance). Il y a un double sens au mot « temps ». Si on réunit les deux sens du temps, on a : le salaire = l’intérêt. Et sur base de cette égalité, on peut dire , comme Marx, que c’est le travail qui génère le profit (l’intérêt).
Mais en fait, il y a comme une structure en miroir entre le passé économique et le futur financier, dans laquelle ce futur financier (le remboursement avec intérêt) domine, tire à lui et surmène le passé économique (le travail) qui constamment peine à rattraper ce futur financier. L’économique passé est l’obligé du financier futur. Le travail est l'obligé de l'intérêt.
Mais ne faudrait-il pas remettre en question certains dogmes de l’économie-finance ?
I. C’est le travail qui fait la plus-value ou le profit. Oui, mais non. En fait ce qui apporte un bénéfice c’est le travail qui ne coûte rien, à savoir l’inventivité intellectuelle dont toute l’humanité peut profiter à grande échelle. Mais pas le travail manuel. Le travail manuel brut, c.-à-d. sans une invention intellectuelle qui l’organise et le met en forme, et le rend plus productif, eh bien ce travail manuel, pure force physique, n’apporte pas plus de profit que les matières premières ou les machines : il est comme elles un coût, rien d’autre. Mais l’inventivité intellectuelle n’est jamais rétribuée à sa juste valeur, étant donné qu’on ne peut ni la quantifier, ni la qualifier : combien de temps et d’efforts de recherche pour une invention, pour une trouvaille ? Et quelle est la valeur exacte de cette invention ou découverte ? C’est cette gratuité(*) quasi obligée de cette inventivité qui est le véritable facteur de désappauvrissement de l’humanité. Trop souvent il y a dévalorisation de l’effort et de l’inventivité intellectuels et corrélativement une surévaluation du travail manuel. Il faudrait remettre le travail en général et le travail manuel en particulier à la place qui est la sienne, à savoir un coût et pas une plus-value.
II. Peut-on d’une manière générale quantifier et même qualifier le travail ? Combien de travailleurs feraient mieux de rester au chômage plutôt que d’être contre-productifs à leur travail ? Et en plus ces travailleurs, qui au lieu d’apporter un plus ne font que du sabotage, sont plus payés que des chômeurs. Prenons le cas d’un professeur de mathématiques qui dégoûte les élèves des mathématiques. N’aurait-il pas mieux valu que ce professeur reste au chômage ? Bref il n’y a aucune mesure objective du travail d’un travailleur, ni en quantité ni en qualité, et donc jamais on ne peut dire qu’un salaire est mérité ou pas. C’est la raison pour laquelle, pour qu’il n’y ait pas d’injustice, tout le monde devrait être payé avec le même salaire. Sinon des travailleurs qui soi-disant travaillent mais en fait ne font rien, sont mieux payés que des travailleurs qui font beaucoup, et sont même mieux payés que des chômeurs. Est-ce normal ?
III. Les entreprises ont d’office des objectifs tournés vers le bien de toute la société. Mais non. Tous les travailleurs , tous les producteurs d’une entreprise travaillent d’abord et avant tout pour eux-mêmes, et pas pour les consommateurs ou les clients. C’est l’adage bien connu : « Si le client est roi, le commerçant est empereur ». Si vraiment les firmes étaient tournées vers le client (au lieu d’être tournées vers elles-mêmes), les gens trouveraient à acheter ce dont ils ont vraiment besoin et qui leur convient. Par exemple il n’y aurait pas toutes ces stupides voitures axées uniquement sur la puissance et la vitesse ou le design, mais bien plutôt axées sur la sécurité, l’économie, la fiabilité, la durabilité, etc. Quoiqu’on en dise, dans cette société de soi-disant abondance, souvent on trouve difficilement ce dont on a vraiment besoin, souvent on est bien obligé de se rabattre sur ce que les firmes (tous travailleurs confondus) condescendent à fabriquer et vendre(**).
IV. On considère généralement l’indexation des salaires (sur base d’un index à la consommation) comme allant de soi. Une indexation en pourcentage consiste à maintenir toujours le même rapport (p. ex. de 1 à 1,5 ; ou de 1 à 4 ; etc.) entre différents salaires quelle que soit l’augmentation. Le problème est qu’un petit salaire dépense tout à de la consommation, tandis qu’un gros salaire n’en dépense qu’une partie, le reste peut être épargné ou investi. Question concernant le gros salaire : pourquoi aligner (augmenter) sur de la consommation de l’argent qui n’est pas destiné à de la consommation mais à de l’épargne ou de l’investissement ? Et on voit bien que cette indexation profite surtout aux gros salaires, les petits salaires ne faisant que diminuer en fait, l’écart entre les salaires augmentant. Puisqu’il s’agit d’un index à la consommation, il faudrait donner à tout le monde la même somme, basée sur l’indexation du salaire le moins élévé, puisque la société, à moins d’être hypocrite et vicieuse, estime que ce salaire le moins élévé est suffisant pour vivre normalement, pour consommer normalement, c’est-à-dire est suffisant pour la consommation.
Que retenir de tout ceci ? La réflexion est toujours provisoire, en chemin, mais on voit que le combat (ou débat ?) entre les dieux(***) Travail et Argent n’est pas près d’être résolu.
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(*) Une preuve que la gratuité du progrès intellectuel est vue comme allant de soi, c’est qu’on ne paye pas les élèves et les étudiants. Sans doute que les travailleurs manuels estiment que le cerveau est une machine qui fonctionne toute seule et que le développement intellectuel n’ a rien à voir avec l’effort et la fatigue ? Mais attention, on n’oppose pas ici le travailleur intellectuel au travailleur manuel ; on oppose le travail à l’inventivité – un manuel peut aussi être inventif.
(**) Mais ce phénomène n’est pas propre aux entreprises, il s’agit d’un phénomène humain généralisé. Ainsi on peut dire que l’enseignement est fait pour les enseignants et pas pour les enseignés (sinon ceux-ci ne s’embêteraient pas autant à l’école) ; que l’hôpital est fait pour les soignants et pas pour les soignés (sinon le séjour à l’hôpital serait plus correct) ; que le Ministère est fait pour les fonctionnaires et pas pour le public (sinon ces fonctionnaires seraient travailleurs, compétents et compréhensifs, ce que souvent ils ne sont pas) ; et ainsi de suite.
(***) C’est le débat (ou le combat ?) entre l’Economie et la Finance, ou entre le Travail et l’Argent, ou entre « le réel » (soi-disant) et « le virtuel » (soi-disant). Mais à partir du moment où ce qui est « réel » se virtualise et où ce qui est « virtuel » se réalise, il faudrait peut-être penser à élargir ce cadre pour le débat en question.
Dernière édition par Alotar le Ven 24 Oct - 2:51:58, édité 2 fois
Alotar- Nombre de messages : 24
Age : 107
Emploi/loisirs : kayak sur le danube
Date d'inscription : 29/08/2008
eh bien !!!
ça fait longtemps que je ne suis pas passé par ici et je peux m'appercevoir que le niveau n'a toujours pas baissé. Enjoy va encore piquer une crise !!! LOL
Plus sérieusement, repenser l'économie et l'entreprise est le sujet à la mode avec l'explosion de la crise financière. Avant même de réfléchir à une autre entreprise, il faudrait peut-être commencer par réfléchir sur ce qui nous a aliéné depuis quasi les écrits de Ricardo et Smith (je ne retiendrai pas ici Marx qui fut un essai non-transformé). Pourquoi, depuis que le capitalisme a pris de l'expension, les hommes n'ont-ils pas pris une minute la peine de s'asseoir et de remettre en cause l'idée même du capitalisme ? Certes, Marx l'a fait avec Engels, mais ils ont fait partir leurs analyse du capitalisme justement. Pourquoi des gens n'ont-ils pas cherché à raser ni plus ni moins toute référence au capitalisme pour, sur une feuille vièrge, tenter de créer autre chose ? Bien entendu, il y a eu les repressions conservatrices et libérales à travers le monde (hors régimes communistes qui n'étaient justement pas communiste), il y a eu la pensée unique, le lavage de cerveau scolaire et universitaire, la montée du niveau de vie occidental au détriment du reste du monde (phénomène qui est en train de s'inverser), l'illusion du bonheur dans la consommation rédemptrice, mais fondamentalement, qu'a-t-il manqué pour que quelque chose d'autre soit pensé ? Il aurait fallu du courage et un retour à plus d'humilité, tout ce que l'occident, justement, a perdu et, malheureusement, exporté à travers le monde. Certes, Sarkozy, Merkel, Bush, ou encore Brown prônent actuellement une refondation du capitalisme, mais en s'empressant de préciser que les fondements sont indépassables. Or, il est là le problème, c'est que les fameux fondamentaux sont justement dépassés. Ce qui ne veut pas dire non plus que le capitalisme disparaitra du jour au lendemain. les agonies peuvent être longues. mais si rien n'est pensé, cette agonie conduira au chaos.
Plus sérieusement, repenser l'économie et l'entreprise est le sujet à la mode avec l'explosion de la crise financière. Avant même de réfléchir à une autre entreprise, il faudrait peut-être commencer par réfléchir sur ce qui nous a aliéné depuis quasi les écrits de Ricardo et Smith (je ne retiendrai pas ici Marx qui fut un essai non-transformé). Pourquoi, depuis que le capitalisme a pris de l'expension, les hommes n'ont-ils pas pris une minute la peine de s'asseoir et de remettre en cause l'idée même du capitalisme ? Certes, Marx l'a fait avec Engels, mais ils ont fait partir leurs analyse du capitalisme justement. Pourquoi des gens n'ont-ils pas cherché à raser ni plus ni moins toute référence au capitalisme pour, sur une feuille vièrge, tenter de créer autre chose ? Bien entendu, il y a eu les repressions conservatrices et libérales à travers le monde (hors régimes communistes qui n'étaient justement pas communiste), il y a eu la pensée unique, le lavage de cerveau scolaire et universitaire, la montée du niveau de vie occidental au détriment du reste du monde (phénomène qui est en train de s'inverser), l'illusion du bonheur dans la consommation rédemptrice, mais fondamentalement, qu'a-t-il manqué pour que quelque chose d'autre soit pensé ? Il aurait fallu du courage et un retour à plus d'humilité, tout ce que l'occident, justement, a perdu et, malheureusement, exporté à travers le monde. Certes, Sarkozy, Merkel, Bush, ou encore Brown prônent actuellement une refondation du capitalisme, mais en s'empressant de préciser que les fondements sont indépassables. Or, il est là le problème, c'est que les fameux fondamentaux sont justement dépassés. Ce qui ne veut pas dire non plus que le capitalisme disparaitra du jour au lendemain. les agonies peuvent être longues. mais si rien n'est pensé, cette agonie conduira au chaos.
franco45- Invité
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